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Poème des Poèmes ­ Shir Hashirîm ­ Le Cantique des Cantiques

Liminaire pour Cinq volumes

     Hamesh Meguilot, Cinq volumes, ce titre désigne les cinq textes les plus brefs de l’ensemble des Écrits: Poème des Poèmes, Rout, Quoi ?, Qohèlèt, Èstér.

     Ces volumes ­ tant en raison de leur contenu que de leur brièveté ­ sont d’un usage constant dans la liturgie synagogale, d’où leur groupement en un seul livre suivant une tradition tardive. Ni les sources anciennes, ni les LXX, ni le Talmud, ni les midrashîm ne rapprochent ces textes des Écrits. Le nom de meguila, « volume », est employé dans ces sources anciennes pour désigner le volume d’Èstér qui était lu publiquement avant la destruction du Temple. Beaucoup plus tard, les cinq meguilot sont regroupées comme nous le faisons ici, c’est-à-dire dans un ordre litturgique, celui de leur lecture tout au long de l’année.



Liminaire pour Poème des Poèmes

     Shir ha-shirîm, Poème des poèmes, c’est-à-dire Poème par excellence: tel est le titre que se donne lui-même le premier des « Cinq Volumes », et qui a été intitulé en français « Cantique des cantiques », par simple transcription du latin. Il est rapporté à Shelomo (Salomon), le sage entre les sages, sans qu’on puisse dire si le relatif asher désigne ce roi comme auteur ou comme destinataire de ce texte admirable.

     Une lecture attentive des cent dix-sept versets qui le composent révèle deux plans de signification qui se marient: un plan humain, où l’auteur met en scène un homme et une femme unis par l’amour, et un plan cosmique relatif à la création entière. Les lecteurs qui ne verraient ici qu’une histoire d’amour élimineraient, consciemment ou non, les vastes horizons d’où cet amour surgit et dans lesquels il se meut. C’est dans l’universalité du réel que naît l’amour. Aussi la poésie hébraïque marie-t-elle ici l’humain au cosmos; elle voit le réel sous la forme d’un homme, et dans cet homme la totalité de l’univers.

     L’unité de l’oeuvre se dégage, comme celle d’une symphonie, des thèmes qui la composent et s’y affirment tour à tour. Le premier est celui de la genèse de l’amour. On doit lire le deuxième verset, non comme un simple voeu, mais comme une certitude: l’amour est présent; l’amante est sûre que son amant la baisera des baisers de sa bouche. Le triomphe final de l’amour absolu est, dans sa genèse même, un acte de foi, d’adhérence.

     En contrepoint surgit le deuxième thème, celui de l’exil (3,1-5). L’amante recherche l’amant absent. Après avoir été simplement esquissé, ce thème disparaît pour laisser la place à celui de la contemplation amoureuse. Porté dans un palanquin, le roi s’avance vers son aimée. L’ayant retrouvée, il ne cesse de la chanter et d’exalter sa beauté.

     La partie centrale du poème est la plus importante; c’est elle qui donne toute sa signification à l’oeuvre. Le thème de l’exil, de la solitude et de la souffrance est repris à fond. L’amante, plongée dans un demi-sommeil, n’a pas répondu à l’appel de l’amant. Celui-ci renonce à elle et part, la laissant à sa solitude, à son exil. Elle y affronte de nouvelles et plus cruelles épreuves. Sa quête fidèle de l’amour la sauve. Le couple se recherche à nouveau dans la joie de la contemplation d’amour.

     Le troisième thème explose enfin dans la joie des retrouvailles: l’exil a pris fin, la souffrance est rédimée. Les amants se réunissent dans la suavités des noces éternelles, dans le printemps nouveau qui ne passera pas. Au paroxysme de la passion assouvie, ils célèbrent l’amour réalisé dans la mutation de l’être, scellé à jamais, inexorable comme la mort.

     Les trois motifs fondamentaux qui forment la trame du poème se retrouvent en profondeur dans la Bible tout entière, traversée, elle aussi, par le triple thème de la création, de la chute ­ ou de l’exil ­ et de la rédemption. Unique entre tous les livres bibliques, le Poème des Poèmes s’affirme en même temps comme le plus complet, le plus universel, et peut-être le plus parfait. Un des livres les plus courts de la Bible, et l’un des plus nécessaires. Rabbi Aquiba l’a dit: « Le monde n’avait ni valeur ni sens avant que le Poème des Poèmes fût donné à Israël. » En lui, nous lisons le poème sacré par excellence, celui qui célèbre l’amour absolu, dans des perspectives et sur des rythmes qui font écho à la sublimité du chant des univers.


Chapitre 1.

Poème des Poèmes

1.     Poème des poèmes qui est à Shelomo.
2.     Il me baisera des baisers de sa bouche;
oui, tes étreintes sont meilleures que le vin.
3.     À l’odeur, tes huiles sont bonnes, ton nom est une huile jaillissante;
aussi, les nubiles t’aiment.
4.     Tire-moi derrière toi, courons !
Le roi m’a fait venir en ses intérieurs.
Jubilons, réjouissons-nous en toi !
Mémorisons tes étreintes mieux que le vin ! Les rectitudes t’aiment.

5.     Moi, noire, harmonieuse, filles de Ieroushalaîm,
comme tentes de Qédar, comme tentures de Shelomo.
6.     Ne me voyez pas, moi, la noirâtre: oui, le soleil en moi s’est miré.
Les fils de ma mère ont brûlé contre moi;
ils m’ont mise gardienne de vignobles.
Mon vignoble à moi, je ne l’ai pas gardé !
7.     Rapporte-moi, toi que mon être aime,
où tu pais, où tu t’étends à midi;
car pourquoi serais-je comme affublée,
auprès des troupeaux de tes amis ?
8.     Si tu ne le sais pas pour toi, la belle parmi les femmes,
sors pour toi sur les traces des ovins;
pâture tes chevreaux aux demeures des pâtres.

9.     À ma jument, aux attelages de Pharaon, je te compare, ô ma compagne !
10.     Tes joues sont harmonieuses dans les pendeloques,
ton cou dans les gemmes.
11.     Nous ferons pour toi des pendeloques d’or,
avec des pointes d’argent.
12.     Le roi encore sur son divan,
mon nard donne son odeur.
13.     Mon amant est pour moi un sachet de myrrhe;
il nuite entre mes seins.
14.     Mon amant est pour moi une grappe de cypre,
aux vignobles de ‘Éïn Guèdi.
15.     Te voici belle, ma compagne,
te voici belle aux yeux palombes.
16.     Te voici beau, mon amant, suave aussi;
aussi notre berceau est luxuriant.
17.     Les cèdres sont les poutres de nos maisons;
nos lambris, des genévriers.

Chapitre 2.

Lotus des vallées

1.     Moi, l’amaryllis du Sharôn, le lotus des vallées.
2.     Comme un lotus parmi les vinettiers,
telle est ma compagne parmi les filles.
3.     Comme un pommier parmi les arbres de la forêt,
tel est mon amant parmi les fils.
Je désirais son ombre, j’y habite;
son fruit est doux à mon palais.
4.     Il m’a fait venir à la maison du vin;
son étendard sur moi, c’est l’amour.
5.     Soutenez-moi d’éclairs, tapissez-moi de pommes:
oui, je suis malade d’amour.
6.     Sa gauche dessous ma tête, sa droite m’étreint.
7.     Je vous adjure, filles de Ieroushalaîm,
par les gazelles ou par les biches du champ,
n’éveillez pas, ne réveillez pas l’amour avant qu’il le désire !

Va vers toi-même

8.     La voix de mon amant ! Le voici, il vient !
Il bondit sur les monts, il saute sur les collines.
9.     Il ressemble, mon amant, à la gazelle ou au faon des chevreuils...
Le voici, il se dresse derrière notre muraille !
Il guette aux fenêtres, il épie aux treillages !
10.     Il répond, mon amant, et me dit: Lève-toi vers toi-même,
ma compagne, ma belle, et va vers toi-même !
11.     Oui, voici, l’hiver est passé,
la pluie a cessé, elle s’en est allée.
12.     Les bourgeons se voient sur terre,
le temps du rossignol est arrivé,
la voix de la tourterelle s’entend sur notre terre.
13.     Le figuier embaume ses sycones,
les vignes en pousse donnent leur parfum.
Lève-toi vers toi-même, ma compagne, ma belle, et va vers toi-même !
14.     Ma palombe aux fentes du rocher, au secret de la marche,
fais-moi voir ta vue, fais-moi entendre ta voix !
Oui, ta voix est suave, ta vue harmonieuse.
15.     Saisissez pour nous les renards, les petits renards,
saboteurs de vignobles ! Nos vignobles sont en pousse.
16.     Mon amant à moi, et moi à lui, le pâtre aux lotus.
17.     Jusqu’à ce que le jour se gonfle, s’enfuient les ombres,
fais volte-face, ressemble pour toi, mon amant,
à la gazelle ou au faon des chevreuils, sur les monts de la rupture.

Chapitre 3.

Noces

1.     Sur ma couche, dans les nuits, j’ai cherché celui qu’aime mon être.
Je l’ai cherché, mais ne l’ai pas trouvé.
2.     Je me lèverai donc, je tournerai dans la ville,
dans les marchés, sur les places.
Je chercherai celui qu’aime mon être. Je l’ai cherché mais ne l’ai pas trouvé.
3.     Les gardes qui tournaient dans la ville m’ont trouvée.
« Celui qu’aime mon être, l’avez-vous vu ? »
4.     De peu les avais-je dépassés que je trouvai celui qu’aime mon être.
Je l’ai saisi et ne le lâcherai pas
avant de l’avoir fait venir à la maison de ma mère,
dans l’intérieur de ma génitrice.
5.     Je vous adjure, filles de Ieroushalaîm,
par les gazelles ou par les biches du champ,
n’éveillez pas, ne réveillez pas l’amour avant qu’il le désire !
6.     Qui est celle qui monte du désert,
comme palmes de fumée, encensée de myrrhe et d’oliban,
de toutes les poudres du colporteur ?
7.     Voici le lit de Shelomo, soixante héros sont autour de lui,
des héros d’Israël;
8.     tous armés d’épée, initiés à la guerre,
chaque homme son épée sur sa cuisse, contre le tremblement des nuits.
9.     Le roi Shelomo s’est fait un palanquin en bois du Lebanôn.
10.     Il fait ses colonnes d’argent, sa tapisserie d’or,
ses montants de pourpre, son intérieur tapissé d’amour
par les filles de Ieroushalaîm.
11.     Sortez, voyez, filles de Siôn, le roi Shelomo,
le nimbe dont sa mère l’a nimbé le jour de sa noce,
le jour de la joie de son coeur !

Chapitre 4.

Viens avec moi

1.     Te voici belle, ma compagne, te voici belle !
Tes yeux palombes à travers ton litham;
tes cheveux tel un troupeau de caprins qui dévalent du mont Guil‘ad;
2.     tes dents tel un troupeau de tondues qui montent de la baignade;
oui, toutes jumelées, sans manquantes en elles.
3.     Tes lèvres, tel un fil d’écarlate, ton parler harmonieux;
telle une tranche de grenade, ta tempe à travers ton litham;
4.     et telle la tour de David, ton cou, bâti pour les trophées:
mille pavois y sont suspendus, tous les carquois des héros.
5.     Tes deux seins, tels deux faons, jumeaux de la gazelle,
pâturent dans les lotus.
6.     Avant que le jour se gonfle et s’enfuient les ombres,
j’irai vers moi-même au mont de la myrrhe, à la colline de l’oliban.
7.     Toi, toute belle, ma compagne, sans vice en toi.
8.     Avec moi du Lebanôn, fiancée, avec moi du Lebanôn, tu viendras !
Tu contempleras de la cime d’Amana, de la cime du Senir et du Hermôn,
des tanières de lions, des monts de léopards !
9.     Tu m’as incardié, ma soeur-fiancée, tu m’as incardié
d’un seul de tes yeux, d’un seul joyau de tes colliers.
10.     Qu’elles sont belles, tes étreintes, ma soeur-fiancée,
qu’elles sont bonnes tes étreintes, plus que le vin !
L’odeur de tes huiles plus que tous les aromates !
11.     De nectar, elles dégoulinent, tes lèvres, fiancée !
Le miel et le lait sous ta langue,
l’odeur de tes robes; telle l’odeur du Lebanôn !
12.     Jardin fermé, ma soeur-fiancée, onde fermée, source scellée !
13.     Tes effluves, un paradis de grenades,
avec le fruit des succulences, hennés avec nards;
14.     nard, safran, canne et cinnamome avec tous les bois d’oliban;
myrrhe, aloès, avec toutes les têtes d’aromates !
15.     Source des jardins, puits, eaux vives, liquides du Lebanôn !
16.     Éveille-toi, aquilon ! Viens, simoun, gonfle mon jardin !
Que ses aromates ruissellent !
Mon amant est venu dans son jardin; il mange le fruit de ses succulences.

Chapitre 5.

Enivrez-vous d’étreintes

1.     Je viens dans mon jardin, ma soeur-fiancée,
j’égrappe ma myrrhe avec mon aromate,
je mange mon rayon avec mon miel, je bois mon vin avec du lait.
Mangez, compagnons, buvez, enivrez-vous d’étreintes !

Mon amant

2.     Moi dormant, mon coeur veille.
Une voix: mon amant tape: « Ouvre-moi, ma soeur, ma compagne,
ma palombe, ma parfaite; oui, ma tête est pleine de rosée,
mes boucles, des éclats de la nuit. »
3.     J’ai enlevé mon aube, comment la vêtirai-je ?
J’ai baigné mes pieds, comment les salirais-je ?
4.     Mon amant lance sa main par le trou;
mes boyaux se bouleversent pour lui.
5.     Je me lève moi-même pour ouvrir à mon amant.
Mes mains dégoulinent de myrrhe,
mes doigts de myrrhe ruisselante, sur les paumes du loquet.
6.     J’ouvre moi-même, à mon amant,
mais mon amant s’était esquivé, il était passé.
Mon être s’extasiait à sa parole.
Je l’ai cherché, mais ne l’ai pas trouvé.
J’ai crié vers lui, mais il ne m’a pas répondu.
7.     Ils m’ont trouvée, les gardes qui tournent dans la ville.
Ils m’ont frappée, ils m’ont blessée.
Ils ont emporté mon châle sur moi, les gardes des remparts.
8.     Je vous adjure, filles de Ieroushalaîm,
si vous trouvez mon amant, que lui rapporterez-vous ?
Que je suis malade d’amour...
9.     Qu’est ton amant de plus qu’un amant,
la belle parmi les femmes ?
Qu’est ton amant de plus qu’un amant,
pour que tu nous adjures ainsi ?
10.     Mon amant transparent et rouge, éminent au-dessus des myriades,
11.     sa tête est d’or vermeil; ses boucles ondulent, noires comme le corbeau.
12.     Ses yeux, telle des palombes sur des ruisseaux d’eaux,
baignent dans du lait, habitent en plénitude.
13.     Ses joues, telles une terrasse d’aromates, sont des tours d’épices;
ses lèvres, des lotus, dégoulinent de myrrhe ruisselante.
14.     Ses mains, des sphères d’or remplies d’émeraudes;
son ventre, un bloc d’ivoire évanoui dans des saphirs.
15.     Ses jarrets, des colonnes d’albâtre fondées sur des socles de vermeil.
Sa vue comme le Lebanôn, il est élu comme les cèdres.
16.     Son sein est douceurs, son tout désirable. Voilà mon amant,
voilà mon compagnon, filles de Ieroushalaîm.

Chapitre 6.

Ma compagne

1.     Où est allé ton amant, la belle parmi les femmes,
où fait-il face, ton amant ? Nous le chercherons avec toi.
2.     Mon amant est descendu dans son jardin, sur les terrasses d’aromates,
pour pâturer dans les jardins, pour cueillir des lotus.
3.     Moi à mon amant et mon amant à moi, le pâtre aux lotus.
4.     Tu es belle, ma compagne, telle Tirsa,
harmonieuse, telle Ieroushalaîm,
terrible comme un mirage.
5.     Détourne de moi tes yeux: oui, ils me fascinent !
Ta chevelure, tel un troupeau de caprins qui dévalent de Guil‘ad.
6.     Tes dents, tel un troupeau de brebis qui montent de la baignade;
oui, toutes jumelées, sans manquantes en elles;
7.     et comme une fente de grenade, ta tempe à travers ton litham.
8.     Soixante sont reines, octante concubines, et les nubiles sans nombre.
9.     Elle est unique, elle, ma palombe, ma parfaite, unique, elle,
pour sa mère, immaculée, elle, pour celle qui l’enfanta.
Elles l’ont vue, les filles, et l’ont félicitée;
les reines, les concubines, et l’ont louangée.
10.     Qui est-elle ? Elle s’observe telle une aube,
belle comme la Blanche, immaculée comme l’Incandescent
et terrible comme un mirage.
11.     Je suis descendue au verger du noyer, voir les germinations du torrent,
voir si la vigne a fleuri, étincelé les grenadiers.
12.     Je ne sais, mais mon être m’a mise
aux chars de mon peuple prince !

Chapitre 7.

Shoulamit

1.     Retourne, retourne, la Shoulamit !
Retourne, retourne, nous te contemplerons !
Que contemplez-vous en Shoulamit ?
Comme la ronde des deux camps.

2.     Qu’ils sont beaux, tes pas dans les sandales,
fille de prince ! Le galbe de tes cuisses,
tels des joyaux, est oeuvre de main d’artiste.
3.     Ton ombilic, cratère lunaire, ne manque pas de brandevin.
Ton ventre, une meule de blé enclose de lotus.
4.     Tes deux seins, tels deux faons, jumeaux d’une gazelle.
5.     Ton cou, telle une tour d’ivoire;
tes yeux, des vasques de Hèshbôn, à la Porte de Bat-Rabîm.
Ton nez, comme la tour du Lebanôn, en éclaireur, fait face à Damèssèq.
6.     Ta tête sur toi est comme le Karmèl; les nattes de ta tête,
telle une pourpre; un roi y est captif de boucles.
7.     Que tu es belle, que tu es suave, amour, dans les délices !
8.     Ceci, ta taille, ressemble au palmier, et les seins à des pampres.
9.     J’ai dit: Je montrerai au palmier, j’en saisirai les spathes.
Qu’ils soient donc, tes seins, comme des pampres de vigne,
et l’odeur de ton nez comme celle des pommes.
10.     Ton palais, tel un vin, le bon, va à mon amant aux rectitudes;
il fait balbutier les lèvres des dormeurs.
11.     Moi à mon amant, et sur moi sa passion.
12.     Va, mon amant, sortons au champ, nuitons dans les villages !
13.     Matinaux aux vignobles, nous verrons si la vigne fleurit,
s’ouvre le bouton, étincellent les grenadiers.
Là, je te donnerai mes étreintes.
14.     Les mandragores donnent leur odeur;
en nos ouvertures, toutes succulences, neuves et antiques aussi,
mon amant, je les recèle pour toi.

Chapitre 8.

Sur les monts d’aromates

1.     Qui te donnera à moi pour frère, tétant les seins de ma mère ?
Je te trouverais dehors, je t’embrasserais.
Ainsi, ils ne me mépriseraient pas.
2.     Je te conduis, je te fais venir à la maison de ma mère. Initie-moi.
Je t’abreuve de vin épicé, du jus de ma grenade.
3.     Sa gauche sous ma tête, sa droite m’étreint.
4.     Je vous adjure, filles de Ieroushalaîm !
Quoi ! vous éveillerez !
Quoi ! vous réveillerez l’amour avant qu’il le veuille ?
5.     Qui est celle qui monte du désert, accoudée sur son amant ?
Sous le pommier, je t’ai éveillé;
là, ta mère te conçut, là te conçut ta procréatrice.
6.     Mets-moi comme un sceau sur ton coeur, comme un sceau sur ton bras.
Oui, l’amour est inexorable comme la mort,
l’ardeur, dure comme le Shéol.
Ses fulgurations sont fulgurations de feu, flammes de Yah !
7.     Les eaux multiples ne pourront éteindre l’amour,
les fleuves ne les submergeront pas.
Si un homme donnait toute la richesse de sa maison pour l’amour,
de mépris ils le mépriseraient.
8.     Nous avons une soeur, petite et sans seins.
Que ferons-nous pour notre soeur, le jour où il sera parlé d’elle ?
9.     Si rempart elle est, nous lui bâtirons un créneau d’argent;
si porte elle est, nous serrerons contre elle une planche de cèdre.
10.     Moi, rempart, mes seins sont comme des tours.
Alors je devins à ses yeux comme l’inventrice de la paix.
11.     Il était à Shelomo un vignoble, en Ba‘al Amôn.
Il donna le vignoble aux gardiens,
et chaque homme apportait pour son fruit un millier d’argent.
12.     Mon vignoble à moi en face de moi,
le millier est à toi, Shelomo, et deux cents aux gardiens de son fruit !
13.     Habitante des jardins, des amis sont attentifs à ta voix.
Fais-moi entendre...
14.     Fuis, mon amant, ressemble pour toi à la gazelle ou au faon des cerfs,
sur les monts d’aromates.